Au rythme des liturgies chaldéennes, des dizaines de chrétiens de Mossoul ont célébré vendredi une messe inaugurale dans leur église fraîchement restaurée, une décennie après l'arrivée du groupe Etat islamique (EI) qui avait réquisitionné le bâtiment pour sa police religieuse.
"Je suis extrêmement heureuse, j'attendais ce jour-là", soupire la septuagénaire Ilham Abdullah, dans l'enceinte de l'église chaldéenne catholique Oum al-Maouna (Mère de l'entraide), reconstruite avec son école attenante dans la grande métropole du nord de l'Irak.
Sous les imposants chandeliers de la nef soutenue par des piliers de marbres gris, les fidèles récitent les chants religieux et les prières, devant l'autel surmonté d'une statue de la Vierge Marie.
Depuis la cour, le visiteur aperçoit deux coupoles peintes d'un rouge resplendissant, coiffées de crucifix.
"C'est comme si on était revenu à la vie, après que les forces oppressives de l'EI nous ont poussé à l'exil", confie à l'AFP l'ancien directeur de banque Abdel Messih Salim, 75 ans, venu tout spécialement d'Erbil, plus au nord, où il s'est installé après avoir abandonné sa ville natale.
En 2017, une équipe de l'AFP s'était rendue dans l'église ravagée: des affiches de l'EI avaient été placardées sur les colonnes et pas un seul crucifix, pas une seule statue n'avaient été préservés.
A l'époque, un commandant des forces de sécurité assurait que les lieux avaient été occupés par la police religieuse des jihadistes, qui contraignaient les populations à suivre leur interprétation extrémiste.
Après sa montée en puissance fulgurante en 2014, l'EI a été mis en déroute en Irak en 2017 par les forces irakiennes et une coalition internationale emmenée par les Etats-Unis.
Jadis haut lieu du christianisme, Mossoul et sa région de Ninive, où le pape François s'est rendu lors d'un voyage historique en 2021, tentent de retrouver un semblant de normalité malgré une reconstruction à la traîne.
Les dizaines de milliers de chrétiens ayant fui l'arrivée des jihadistes en 2014 n'y sont toujours pas retournés.
Forte de plus de 1,5 million de personnes avant la chute de Saddam Hussein en 2003, la communauté chrétienne d'Irak s'est réduite comme peau de chagrin à quelque 400.000 âmes, beaucoup ayant fui par vagues successives les violences qui ont ensanglanté le pays.
L'arrivée de l'EI avait aggravé l'hémorragie.
Patriarche de l'Eglise catholique chaldéenne, le cardinal Louis Raphaël Sako a fait le déplacement pour l'inauguration d'Oum al-Maouna. "C'est notre pays, cette terre est la nôtre, et même si nous ne sommes plus beaucoup, nous sommes là pour rester".
La Rédaction (avec AFP)